lundi 30 mars 2020

Premiers épisodes de mon audiobook !

Salut la compagnie !

Cela fait plus d'un an maintenant que je patauge dans la réécriture de ma thèse qui a été proposée pour publication dans une collection de l'Harmattan à comité de lecture intitulée "anthropologie et musique" (https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=collection&no=941). et dont les éditeurs sont Yves Defrance, Luc Charles-Dominique et Monique Desroches.

Pour me donner un coup de fouet, avoir un petit objectif à court terme et aussi parce qu'en ces temps de confinement ça pourrait en occuper certains, je prépare chaque semaine un bout de lecture de la version "work in progress" de mon livre. Il y a déjà deux épisodes : le préambule sur l'usage d'Amazing Grace par Barack Obama en 2015, et la première partie de l'introduction intitulée "american folk music : une catégorie musicale construite" où j'explique que l'american folk music est appréhendée dans ce livre non pas comme une réalité ontologique, mais comme une catégorie musicale en construction dont le sens évolue en fonction des experts qui l'abordent et que c'est précisément l'historicité de cette notion et les parcours de ses inventeurs qui occupent ce travail plutôt qu'un répertoire ou des pratiques musicales spécifiques.

Voici le lien vers mon profil soundcloud où je poste ces épisodes d'audiobook :
https://soundcloud.com/user-321351695

Bonne écoute !

Lien vers le PDF de ma thèse de doc : Les inventeurs de l'American Folk Music de l'époque progressiste au New Deal autour de la collectrice Sidney Robertson

 

 C'est par ici !: https://bdr.parisnanterre.fr/theses/internet/2018/2018PA100075/2018PA100075.pdf

Résumé (english bellow)

À partir des années 1890, la construction de l’identité nationale américaine et d’un citoyen moderne mobilise différentes définitions de la notion de folk music, issues de différents milieux intellectuels et fondées sur une multiplication des collectes, pour culminer à la fin du New Deal en l’établissement d’un consensus sur l’existence et le contenu de base de l'American Folk Music. Compositeurs et musicologues construisent l’American Folk Music pour tenter de fonder une école de composition américaine qui rivaliserait avec les écoles européennes. Les folkloristes universitaires l’abordent en tant qu’objet d’étude, selon une approche textualiste et donc nécessairement anglo-centrée. Des anthropologues se saisissent aussi de cette notion pour l'appliquer aux musiques amérindiennes, puis à celles des Noirs-Américains. Avec les psychologues, ils y introduisent les influences des approches évolutionniste, diffusionniste, fonctionnaliste et relativiste. Éducateurs progressistes et travailleurs sociaux l’emploieront dans des projets d’ingénierie sociale, notamment en relation avec le mouvement d'américanisation. Tous ces paradigmes coexistent et s’opposent ou s’influencent jusque dans les années 1930, moment où l’institutionnalisation de l’American Folk Music au sein de l’État fédéral conduit à une rencontre et une forme de synthèse de toutes ces approches. Cette thèse explore les travaux des inventeurs de l’American Folk Music autour du parcours d’une des collectrices qui établissent la synthèse new-dealienne, Sidney Robertson.
 
From the 1890's on, the construction of American national identity and of the modern citizen draws on various definitions of the notion of folk music, produced by various intellectual circles and supported by the development of field collecting, to result towards the end of the New Deal Era in a tentative consensus on the basic content and the very existence of American Folk Music. Composers and musicologists address American Folk Music as a tool to try and set up an American composition school to rival the european ones. Academic folklorists approach it as a scholarly object through a text-centered paradigm requiring its linguistic anglo-centeredness. Anthropologists apply the notion to Amerindian, then later on Black-American musics. Along with the psychologists, they introduce in its definition the new concepts and bias of the competing evolutionist, diffusionist, functionalist and relativist theoretical schools. Progressive educators and social workers use it in their social engineering programs, most importantly in the Americanization-related ones.These various paradigms coexist, compete, and influence each other until the 1930's, when the institutionalization of American Folk Music inside Federal State agencies encourages a synthesis of these different approaches. The present thesis aims to describe the works and ideas of these various contributors to the invention of the American Folk Music through the study of the life and career of one of the New Deal collectors instrumental in this synthesis, Sidney Robertson.

samedi 21 mars 2020

Collectes de musiques des francophones du Nord-Est des Etats-Unis (années 1930-1940). Quelques nouvelles sur mes projets de recherche actuels et des liens vers des ressources en ligne.



Boudiou ! À deux jours près, ce blog est à l'abandon depuis 5 ans !
À ma décharge, les dernières années de thèse ont été chargées, sans compter le développement de ma carrière de banjoiste de bar ;-)
Il aura fallu une mise en quarantaine pour enfin songer à reprendre les activités de blogage et finalement passer à l’acte !
Mes précédents billets ne sont pour l'instant plus consultables, car j'ai des soucis de mises en page et aussi parce qu'ils ne sont plus du tout à fait à jour...


Ces derniers mois, je m'oriente vers une spécialisation dans l’histoire des collectes de musiques francophones dans le Nord-Est des États-Unis, autour des collections d’Alan Lomax de 1938 dans le Michigan et l’Indiana et celles d'Hélène Stratman Thomas dans le Wisconsin dans les années 1940. Les enregistrements de terrain réalisés par cette dernière et son équipe dans les années 1940 sous l'égide de l'Université du Wisconsin sont disponibles à cette adresse : https://www.library.wisc.edu/music/home/collections/wisconsin-music-archives/wisconsin-folk-music-project/. On y trouve notamment des chants d'immigrés d'origine walonne et québécoise. On peut aussi écouter les enregistrements réalisés par Lomax dans le Michigan à cette adresse : https://www.loc.gov/collections/alan-lomax-in-michigan/about-this-collection/. Ceux de l'Indiana n'ont pour l'instant pas été numérisés.
Si les collectes de musiques "ethniques" dans l'Upper Midwest vous intéresse, je recommande chaudement les travaux de James P. Leary notamment Folksongs of Another America (2015). Vous pouvez aussi l'écouter ici dans une conférence à la Bibliothèque du Congrès : 



Les collectes de chants francophones par Alan Lomax à Vincennes, Indiana - ancien fort de la Nouvelle France des coureurs de bois - et à Baraga, Michigan où ont immigrés de nombreux fermiers québécois dans les années 1870 sont bien moins connues et étudiées que ses travaux sur d'autres espaces francophones tels que la Louisiane ou les Caraïbes. À ce propos, je vous recommande de jeter un œil et une oreille sur le site internet de Joshua Clegg Caffery, l'expert de la campagne louisianaise de John et Alan Lomax en 1934 : https://www.lomax1934.com/ ainsi que sur cette présentation par le spécialiste de la campagne d'Haïti de 1936-37 Gage Averill : 
 
Mon projet consiste donc à explorer ces terrains oubliés, dans un premier temps en travaillant sur les matériaux en eux-même ( transcription et traduction des paroles, analyses textuelles et musicales, comparaison avec de possibles variantes de France métropolitaine ou autres régions francophones...). Ensuite, il faudra les replacer dans leur contexte historique et intellectuel : les politiques culturelles du New Deal et les projets de documentation des cultures du peuple, et la redéfinition de l'objet folk music par les spécialistes qui prennent leur distance avec les représentations archaïsantes et anglo-centrées pour l'aborder plutôt comme une forme culturelle moderne et dynamique et donc inclure à leur collection des musiques urbaines et d'immigrés récents. 
Alan Lomax, s'il est sans nul doute le plus célèbre des collecteurs américains, n'est ni le premier ni le seul à enregistrer les musiques du peuple et je souhaite aussi aborder ses travaux à la lumière de ceux de ses collègues qui se sont également intéressés aux poches francophones des États-Unis nordistes des bucherons et des coureurs de bois. Parmi eux, ou plutôt elles (la collecte est en fait bien souvent une affaire de femmes), je vais m'intéresser plus particulièrement à Hélène Stratman Thomas et à l'énigmatique anthropologue française Ariane de Félice qui a collecté des contes en français en Louisiane, au Michigan et en Nouvelle-Angleterre pour le compte du Musée des Arts et Traditions Populaires en 1946. Elle mérite un billet à part entière, donc je ne m'étend pas dessus pour l'instant. 
Finalement, l'un de mes objectifs à long terme sera de contribuer à l'étude des échanges scientifiques franco-américains en matière de folklore et d'ethnomusicologie. 
Je m'arrête ici pour l'instant, et vous laisse en compagnie du fantastique chanteur, violoniste et cloger d'origine québécoise Edward King de Baraga, Michigan (film original par Alan Lomax, édité et publié dans le dvd accompagnant l'ouvrage Folksongs of Another America de James P. Leary)